De la chaise d’école au siège du bus, du canapé au lit, et rebelote le lendemain… Dans leur vie quotidienne, de nombreux adolescents ne fournissent que très peu d’efforts physiques.
Trop peu, même, d’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui met en garde contre les effets délétères de cette inactivité dans une étude publiée vendredi 22 novembre dans la revue médicale The Lancet Child & Adolescent Health. A travers le monde, plus de 80 % des jeunes ne satisfont pas à la recommandation officielle qui est d’effectuer une heure d’exercice chaque jour.
Pour parvenir à cette estimation, les chercheurs ont compilé des données recueillies dans le cadre scolaire auprès de 1,6 million d’adolescents âgés de 11 à 17 ans et résidant dans 146 pays différents. « Ces jeunes ont répondu à des questionnaires sur leurs dépenses physiques au sens large, comprenant le sport mais aussi les déplacements actifs comme la marche ou les tâches domestiques », explique Regina Guthold, de l’OMS, auteure principale de l’étude.
Basées sur des autoévaluations, ces données comprennent une part d’imprécision. Par ailleurs, seuls les ados allant à l’école ont été pris en considération, alors que, dans certains pays, ils sont nombreux à avoir arrêté leur scolarité. « Mais ces résultats sont probablement les meilleures estimations disponibles des tendances globales, régionales et temporelles pour les niveaux d’activité physique chez les adolescents », estime Mark Tremblay, de l’Institut de recherche du Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario (Canada), dans un commentaire qui accompagne l’étude. Sa conclusion est sans appel : les ados sont trop sédentaires. Et le problème ne se cantonne pas aux pays riches. A titre d’exemple, en 2016, la prévalence de l’inactivité physique des jeunes était de 78,4 % en Moldavie, 87,5 % en Egypte, 93,4 % aux Philippines, 84,7 % au Pérou ou encore 87 % en France. Manque de connaissances ou d’équipements, sécurité insuffisante des infrastructures, accroissement du temps passé devant des écrans : de nombreuses explications sont avancées pour expliquer cette épidémie de paresse.
Or celle-ci met en danger la santé des adolescents : « Le manque d’activité physique entraîne un risque accru de surpoids et de maladies chroniques comme le diabète ou les douleurs de dos », détaille Chiara Testera, de la fondation Promotion Santé Suisse. « Pratiquer de l’exercice régulièrement est favorable au développement cognitif et donc à la capacité à apprendre, explique Regina Guthold. C’est aussi propice à l’établissement de liens sociaux. » Enfin, les études suggèrent que les ados actifs ont tendance à le rester à l’âge adulte.
La Suisse également touchée
En Suisse non plus, les ados ne bougent pas assez: 85,7% d’entre eux n’effectuent pas une heure d’exercice par jour, d’après l’étude de l’OMS. Une étude, réalisée entre 2013 et 2016 par l’Institut tropical et de santé publique suisse (Swiss TPH), avait déjà montré que les enfants et adolescents âgés de 6 à 16 ans passaient plus de 90% de leur temps quotidien en position assise, couchée ou en ne pratiquant qu’une activité physique de faible intensité. «Il y a un bon taux d’activités physiques chez les enfants, mais celui-ci se réduit ensuite malheureusement chez les adolescents», relève Chiara Testera, de Promotion Santé Suisse.
Les filles, les plus concernées
Que ce soit en Suisse ou presque partout ailleurs dans le monde, les jeunes filles sont les plus concernées par le problème. Elles sont globalement 85% à ne pas suivre les recommandations en matière d’activité physique, contre 78% chez leurs congénères masculins. Une situation d’autant plus préoccupante que cet écart continue de se creuser. Alors que la prévalence du manque d’activité physique a diminué de 2% depuis 2001 chez les garçons, elle est restée stable chez les filles.
L’année dernière, les Etats membres de l’OMS se sont mis d’accord sur une feuille de route visant à réduire la prévalence de l’inactivité physique chez les ados de 15% d’ici à 2030. «Au vu des chiffres, il y a peu de chances que nous y parvenions», regrette Regina Guthold, qui invite les pouvoirs publics à se saisir du problème, notamment en développant de nouveaux programmes d’incitation à destination des filles. Promotion Santé Suisse soutient des programmes en faveur du sport et de l’alimentation équilibrée dans 22 des 26 cantons suisses. A l’origine surtout destinés à la petite enfance, ils prennent désormais de plus en plus en compte les ados.