En mars dernier, le comité de la Caisse de prévoyance du personnel de l’Etat (CPPEF) a remis un rapport au Conseil d’Etat lui demandant d’agir pour assurer la pérennité de l’institution de prévoyance menacée par deux tendances. D’une part, l’augmentation de l’espérance de vie induit une péjoration du rapport actifs/retraités et un allongement du versement des rentes. D’autre part, la diminution de l’espérance des rendements sur les marchés financiers a pour conséquence une baisse des revenus financiers attendus par la CPPEF.
Selon la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité, le taux de couverture des engagements totaux de la CPPEF devra atteindre au moins 80% à l’horizon 2052. Si aucune mesure n’est prise, les projections indiquent que ce taux devrait chuter à 45% en 2052. Pour maintenir les prestations actuelles aux assuré(e)s présents au moment du changement de primauté, les employeurs devraient injecter un montant de 1,4 milliard de francs dans la CPPEF (sur la base d’un taux d’intérêt crédité de 2,5% ; dans son rapport, la CPPEF avait basé son estimation sur un coût de 1,8 milliards, sur la base d’un taux d’intérêt crédité de 2%).
Vers un système de primauté des cotisations
Afin de rétablir l’équilibre structurel de la CPPEF, le Conseil d’Etat souhaite procéder au passage du régime de la primauté des prestations à celui de la primauté des cotisations. Mieux à même de garantir la pérennité de la CPPEF, ce modèle est appliqué par une grande majorité des institutions de prévoyance professionnelle de Suisse, publiques ou privées. Lors du passage à la primauté des cotisations, les personnes assurées verront leurs droits acquis préservés en ce qui concerne leur capital accumulé à cette date (prestation de sortie). En revanche, la réforme aura un fort impact sur le montant des rentes attendues à terme : sans financement supplémentaire, la baisse serait de l’ordre de 20% en moyenne. Les personnes les plus proches de l’âge de la retraite seraient les plus touchées. Afin d’atténuer les effets du changement de primauté, des mesures transitoires devront être mises en place. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, ces mesures doivent bénéficier aux personnes qui se trouvent à moins de cinq ans de la retraite. Pour le Conseil d’Etat, il convient toutefois d’élargir le cercle des bénéficiaires. Des mesures compensatoires s’ajouteront ainsi aux mesures transitoires pour couvrir un plus large spectre de personnes.
Trois variantes de mesures transitoires et compensatoires
Afin de prendre en compte les demandes des associations du personnel, le Conseil d’Etat a retenu trois variantes de mesures transitoires et compensatoires :
- dans la première variante, il propose de déployer des mesures transitoires pour les personnes âgées de 54 ans et un mois à 64 ans. Il propose d’y adjoindre des mesures compensatoires en faveur des personnes âgées de 50 ans et plus. Il s’agit de limiter la baisse de la rente attendue à 11,5% pour ces catégories d’âge. L’apport employeurs sera de 500 millions de francs ;
- dans la deuxième variante, le Conseil d’Etat propose d’adjoindre aux mesures transitoires pour les personnes âgées de 54 ans et un mois à 64 ans des mesures compensatoires en faveur des personnes âgées de 45 ans et plus. Il s’agit de limiter la baisse de la rente attendue à 13% pour toutes ces personnes. L’apport employeurs sera de 600 millions de francs ;
- dans la troisième variante, le Conseil d’Etat propose aussi de déployer des mesures transitoires et compensatoires en faveur des personnes âgées de 45 ans et plus. Il s’agit de limiter la baisse de la rente attendue à 15% pour toutes ces personnes. L’apport employeurs sera de 400 millions de francs.
Recapitalisation partielle de la CPPEF
Dans l’avant-projet mis en consultation, le Conseil d’Etat présente, en lien avec la deuxième variante, la possibilité d’opérer une recapitalisation partielle de la CPPEF. Un versement anticipé de cotisations de l’employeur d’un montant de 350 millions de francs permettrait de minimiser la probabilité de devoir solliciter des financements ultérieurs et de mieux faire face aux fluctuations des marchés. L’opération de recapitalisation partielle pourrait néanmoins également être réalisée, aux mêmes conditions, en lien avec les première et troisième variantes. Dans les trois cas (variantes 1,2 et 3), les exigences posées par la législation fédérale s’agissant du taux de couverture de la CPPEF seraient respectées.
Un site internet et un calculateur pour estimer les impacts du changement de primauté
La CPPEF met à disposition un site internet dédié au projet de réforme. Ce site compile l’ensemble des informations disponibles sur le projet et offre aux personnes assurées la possibilité de mesurer l’impact des trois variantes sur leur situation personnelle, au moyen d’un calculateur de rente. Outre le site internet, des séances d’information seront organisées.
Calendrier de la réforme
L’avant-projet de loi est en consultation jusqu’au 15 mars 2019. Le Conseil d’Etat arrêtera ensuite le projet définitif qu’il transmettra au Grand Conseil. Passé l’examen au Grand Conseil, le projet sera soumis aux citoyens et citoyennes fribourgeois. L’entrée en vigueur de la réforme est en principe prévue le 1er janvier 2021.
Conclusion
Les propositions mises en consultation par le Conseil d’Etat visent en priorité à se doter d’une CPPEF solide et durable dans l’intérêt à long terme du service public, des assurés, des retraités et des contribuables.