Dans les années 1520, alors que se répandait la Réforme, le gouvernement de Fribourg décida de rester fidèle à la vieille foi. La ville et le pays qui en dépendait formèrent dès lors un îlot catholique entouré de territoires protestants, et plus d’un siècle durant la querelle religieuse allait peser sur la politique fribourgeoise. En matière confessionnelle, les autorités patriciennes réserveraient leur tolérance aux relations extérieures; envers leurs sujets, elles se montreraient intransigeantes.
Au séisme de la Réforme, l’Eglise catholique réagit en se rénovant («Contre-Réforme» ou «Réforme catholique»). Les directives du Concile de Trente (1545-1563), accordant une valeur primordiale à la rigueur et à l’autodiscipline, renforcèrent le contrôle des pratiques religieuses. A Fribourg l’Etat, conduisant lui-même la reprise en mains, s’efforça d’assurer directement cette fonction. En position de force, il tint longtemps à l’écart son évêque – celui de Lausanne, chassé de son siège par la Réforme – et ne l’accepta sans réserves dans ses murs qu’en 1688, lorsque la charge épiscopale revint… à un patricien de la ville.
Pour enrayer la progression de la Réforme, on mit sur pied à l’échelle européenne un système éducatif préparant les élites sociales (masculines s’entend) à défendre la foi catholique. A la demande du pape les jésuites, qui s’étaient spécialisés dans l’enseignement, fondèrent à Fribourg en 1580 le collège Saint-Michel, ouvert aux garçons dès l’âge d’environ 12 ans. L’établissement fut fondé par Pierre Canisius, un jésuite d’origine néerlandaise fort illustre à l’époque.
D’autres ordres issus de la Contre-Réforme s’installèrent par la suite à Fribourg: les capucins en 1608, à l’invitation du Conseil, et les capucines en 1626, grâce à un pieux donateur. Deux autres communautés religieuses de femmes, les ursulines et les visitandines, réfugiées durant la guerre de Trente ans en 1634 et 1635, virent confirmer leur établissement quelques années plus tard.
Autour de 1600, la production artistique fribourgeoise était encore tributaire des formes médiévales («post-gothique») aux arêtes saillantes. Il fallut quelques décennies pour que s’impose un nouveau répertoire, tout de souplesse et de mouvement («baroque»). Dans tous les pays catholiques, on s’employait alors à sensualiser la religion, le faste des églises devant rendre perceptible au croyant la gloire souveraine de Dieu.