Le Conseil central islamique suisse (CCIS) ne tiendra pas sa conférence annuelle à Forum Fribourg le 29 novembre prochain. Le Préfet de la Sarine lui a en effet refusé l'autorisation de courte durée (patente K) sollicitée en juin dernier. Cette décision résulte d'une mise en balance du principe de la sauvegarde de l'ordre et du bien-être publics - qui est la question centrale posée par l'octroi ou le refus d'une telle patente - et du principe de la liberté de réunion et d'association. Dans les circonstances propres à cette demande particulière, le préfet a conclu que les risques identifiés pour l'ordre public rendaient admissible la limitation de cette liberté.
Risques sérieux de contre-manifestations
Ces risques " probables, sérieux et concrets " pour l'ordre public, identifiés par la Police cantonale dans son préavis négatif, sont principalement de deux ordres. D'une part, le contexte international actuel (en particulier les événements en Irak et en Syrie) et les différentes manifestations, notamment pro-kurdes, qui ont pu se dérouler récemment en Suisse et à Fribourg rendent vraisemblable que certains milieux organisent des contre-manifestations en marge de la conférence du CCIS. D'importants problèmes d'ordre et de sécurité publics, tels que des débordements, des situations de bagarre, de violence ou d'agressions sont à craindre. De tels risques suffisent à eux seuls à fonder un refus d'autorisation, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral.
Pas de liste définitive des orateurs
Indépendamment de ces circonstances extérieures prévisibles, des risques tout aussi sérieux résultent de la conférence elle-même, sous la forme d'un non-respect de l'ordre juridique suisse par l'un ou l'autre des divers orateurs. Durant toute la procédure, la liste des orateurs fournie par différents responsables du CCIS a constamment évolué, si bien que la liste fournie au dépôt de la demande a presque intégralement été modifiée depuis lors, de nouvelles modifications ayant encore été apportées au début du mois de novembre. Une telle incertitude, dont la responsabilité incombe pleinement à l'organisateur, ne permet pas au Préfet d'apprécier cette question en toute connaissance de cause. En outre, le CCIS n'a pas présenté de mesures suffisantes visant à prévenir toute enfreinte à l'ordre juridique suisse dans le cadre de sa conférence, qu'elle émane d'orateurs ou d'autres participants.
Comme le Préfet de la Sarine l'avait déjà rappelé dans le cadre de l'autorisation octroyée à ce même CCIS pour une manifestation similaire en 2012, la liberté de réunion et d'association est un principe fondamental que l'Etat doit s'efforcer de garantir, pour autant qu'aucun motif contraire ne s'y oppose. C'est dans cet esprit qu'il précise que son refus d'autorisation ne concerne que cette manifestation du 29 novembre 2014, en fonction des circonstances particulières, et ne préjuge en rien du sort qui pourrait être réservé à une demande semblable du CCIS pour une manifestation future organisée dans des circonstances différentes.