Le 26 août 2016 vers 18h15 Pascal JAUSSI a appelé la Police cantonale pour demander de l’aide. Il déclarait qu’il brûlait et qu’il se trouvait dans une forêt au-dessus de Cugy/Vesin. A l’arrivée des secours, Pascal JAUSSI souffrait d’importantes brûlures et un véhicule était entièrement la proie des flammes ; il soutenait qu’il avait été victime d’une agression par un inconnu. Cet événement a été le point de départ de l’instruction ouverte ensuite contre Pascal JAUSSI et qui aura duré 8 ans ; il a aussi déterminé la compétence de poursuite et de jugement des autorités judiciaires fribourgeoises (for).
Les enquêteurs et le Ministère public ont rapidement émis des doutes sur cette agression du 26 août 2016. Au terme de l’instruction, ils considèrent que cet évènement a été mis en scène par Pascal JAUSSI. Pour parvenir à cette conclusion, ils ont dû s’intéresser à la personne de Pascal JAUSSI et à ses sociétés. Leurs investigations ont révélé que les sociétés du précité connaissaient d’importantes difficultés financières.
L’instruction a ainsi mis à jour la réalisation d’infractions dans la création et la gestion de la société Swiss Space Systems Holding SA ainsi que des sociétés S3 Solutions SA et Spaceport Immobilier SA, dès la création de la première en 2012. Le Ministère public a retenu principalement à la charge de Pascal JAUSSI d’avoir détourné astucieusement une partie d’un prêt de CHF 10'000'000.00 (détournement à hauteur de CHF 4'810'400.00), d’avoir trompé un proche afin que celui-ci prête la somme de CHF 1'000'000.00 pour payer la caution nécessaire à la venue d’un avion, dont les mensualités pour le leasing n’ont ensuite jamais été honorées (préjudice de plus de CHF 1'300'000.00), d’avoir tardé à annoncer le surendettement de la Holding, d’avoir trompé la Juge de la faillite sur la situation de la Holding (découvert de CHF 31'630'504.39), de s’être versé sur son compte privé plus de CHF 100'000.00 durant la période d’ajournement de la faillite, d’avoir procédé à une augmentation de capital-actions de la société S3 Solutions SA de USD 30'000'000.00 alors que cette augmentation reposait sur une garantie bancaire fausse, d’avoir obtenu l’inscription de cette augmentation au Registre du commerce alors qu’il n’y avait aucun fond à disposition, d’avoir engagé des dépenses somptueuses et disproportionnées au regard de la situation de la Holding, d’avoir procédé à des transferts de fonds de filiales suisses en faveur de la Holding et de celle-ci en faveur de filiales à l’étranger malgré la situation de surendettement, d’avoir partiellement détourné un prêt de CHF 1'850'000.00 versé pour le compte de la société Spaceport Immobilier SA en lien avec un projet immobilier (découvert de CHF 1'850'000.00), et d’avoir encaissé plus de CHF 2'600'000.00 pour la vente de billets pour des vols ZéroG qui n’ont jamais eu lieu.
Pascal JAUSSI a soutenu durant toute l’instruction qu’il avait été victime d’une agression le 26 août 2016. Il a pour le reste nié les infractions qui lui sont reprochées.
La durée de l’instruction peut sembler longue mais il n’en est rien : il s’agit d’une affaire volumineuse par le nombre d’infractions concernées et les pièces à analyser ; complexe, l’affaire a nécessité de nombreuses mesures d’instruction pour faire la lumière, avec notamment des demandes d’entraide judiciaire décernées dans 8 pays et l’analyse de milliers de transactions intervenues sur les comptes bancaires ; Pascal JAUSSI a fait usage de ses droits de personne prévenue en interjetant plusieurs recours contre des décisions rendues en cours de procédure.
Par acte d’accusation du 23 septembre 2024, Pascal JAUSSI a été renvoyé devant le Tribunal pénal de l’arrondissement de la Broye pour les préventions suivantes : induction de la justice en erreur, incendie intentionnel, obtention frauduleuse d’une constatation fausse, escroquerie et tentative d’escroquerie, escroquerie « au procès » et tentative d’escroquerie « au procès », abus de confiance, faux dans les titres, violation de l’obligation de tenir une comptabilité, gestion déloyale, gestion fautive, dénonciation calomnieuse et éventuellement faux renseignements sur des entreprises commerciales. La présomption d’innocence prévaut.
Pascal JAUSSI a aussi bénéficié d’une ordonnance de classement également rendue le 23 septembre 2024 ; cette décision concernait principalement des contraventions pour lesquelles la prescription est entre-temps intervenue.
Il convient enfin de préciser que des procédures pénales ont aussi été ouvertes contre d’autres personnes liées à cette affaire. Certaines procédures sont pendantes devant le Ministère public vaudois alors que les autres procédures conservées à Fribourg ont toutes été closes ou suspendue (pour l’une d’entre elles) avec signalement sous mandat d’arrêt.
Raphaël Bourquin
Procureur général adjoint